La Rue Piétonne artère de la culture guadeloupéenne

La Rue Piétonne artère de la culture guadeloupéenne

Chaque coup sur le Ka résonne dans l’espace pour faire vibrer l’âme de ceux qui recevront ces notes. Culturel, militant et spirituel, le Gwoka, musique traditionnelle ancestrale, vit encore. Chaque samedi au cœur de Pointe-à-Pitre, le Tanbou Pyéton perpétue la tradition locale pour remplir son devoir de transmission.

C’est à Lapwent (Pointe-à-Pitre), sur la rue piétonne, que l’illustre collectif Akiyo se retrouve une fois par semaine pour célébrer le Gwoka. Le temps d’un instant, la rue se transforme en sanctuaire culturel où les tambours accompagnent toutes les expressions.

Le Gwoka

On l’appelle le Ka, tambour traditionnel et héritage ancestral importé en Guadeloupe par les esclaves au 17ᵉ siècle. C’est l’instrument de base de la musique Gwoka dont la rythmique résonne encore à travers le monde et tout particulièrement sur la terre où sa graine africaine a germé. Tous les samedis, une dizaine d’initiés se donnent rendez-vous à Pointe-à-Pitre, rue Saint John Perse, pour faire vivre cet héritage. Cet instant, communément appelé “léwoz”, est un rassemblement populaire durant lequel se réunissent les tanbouyés (joueurs de tambour), pour offrir aux riverains d’une part un spectacle et d’autre part un espace de communion ouvert à tous.

Lewoz

À cet instant, se forme autour des musiciens une ronde dans laquelle ceux et celles qui le souhaitent peuvent entrer s’exprimer en mouvement. Ces derniers peuvent être accompagnés par des chants repris en chœur par les spectateurs qui composent la ronde. Le léwoz, c’est un moment de communion suspendu où locaux comme touristes peuvent prendre part à une effusion d’expressions des corps, des voix et des âmes.

Tanbou Pyeton

En Guadeloupe, la musique Gwoka porte un symbole particulièrement fort et profond. Prônée lors de l’esclavage comme marque de révolte, le son du Ka appelle à l’éveil des consciences collectives. À travers les années, cette musique stigmatisée, décriée, considérée comme « mizik a vié neg », finit par s’imposer dans l’espace public, au cœur de la société guadeloupéenne. D’abord cantonnée aux zones rurales, le Gwoka fait son apparition en ville sous l’impulsion des mouvements nationalistes des années 60-70.

Marcel Lollia, dit Vélo

À cette période, l’illustre tanbouyé Marcel Lollia, dit Vélo, arpente les rues de la Pointe accompagné de son tambour pour y jouer le Gwoka. Malgré ses multiples arrestations par la police, il reviendra propager les ondes de son Ka des années durant. De cette manière, Vélo devient une figure emblématique du Gwoka et contribue à le sceller au sein de la culture populaire guadeloupéenne. C’est d’ailleurs une statue à son effigie qui domine la place de la rue piétonne, devant laquelle ses héritiers viennent jouer et se recueillir. François Ladrezeau, dit Fanswa, chanteur du collectif Akiyo, fait partie de ceux qui veillent à la transmission tous les samedis sur la rue piétonne.

« On est sur la rue piétonne, notre temple, notre église, nous sommes dans l’oralité, la transmission, on est dans l’amour et dans le militantisme culturel. […] On perpétue l’œuvre des anciens parce que sans eux nous ne serions pas là. On continue ce travail car c’est un travail positif qui permet au peuple guadeloupéen de rester à la verticale.« 

Fanswa

Gwoka symbole d’affirmation

Inscrit au patrimoine immatériel de l’UNESCO depuis 2014, le Gwoka continue de s’infuser à travers les générations. Un héritage qu’embrassent même les plus jeunes qui n’hésitent pas à se livrer dans la ronde du Tanbou Pyéton. Au-delà de la tradition, le Gwoka est et restera un symbole d’affirmation, de contestation et d’émancipation qui fait la force du peuple guadeloupéen.

Pour en apprendre plus : Connaissez-vous l’âme ancestrale de la Guadeloupe le Gwo Ka ?

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site est protégé par reCAPTCHA et Google Politique de confidentialité et Conditions d'utilisation appliquer.