Les véritables guerrières du Dahomey loin du fantasme et de l’imaginaire hollywoodien

Les véritables guerrières du Dahomey loin du fantasme et de l’imaginaire hollywoodien

Ces guerrières d’élite et intrepides ne proviennent d’aucun imaginaire. Elles n’ont rien avoir avec la littérature grec ou un quelconque conte américain. Il est nécessaire de corriger cette vision des femmes soldats du Dahomey en la confrontant à la réalité. Ce bataillon a contribué à la puissance militaire du Royaume du Dahomey aux 18e et 19e siècles.

Enrôlées souvent dès l’adolescence, elles vivaient isolées dans les palais royaux. Leur vie était consacrée au maniement des armes, aux entraînements rythmés par des chants et des chorégraphies militaires, aux guerres de conquête et à la protection du Roi. A la fin du 19e siècle, quatre mille guerrières pouvaient être mobilisées en cas de conflit. Elles étaient réparties en différentes unités, chacune possédant ses uniformes, ses drapeaux, ses chants et ses danses de combat.

« […] Celles qui rentrent de la guerre sans avoir conquis doivent mourir. Si nous battons en retraite, notre vie est à la merci du roi. Quelle que soit la ville à attaquer, nous devons la conquérir ou nous enterrer nous même dans ses ruines. » dit un de leur chant de guerre.

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Guerrières du Dahomey

Ces redoutables guerrières surpassaient leurs homologues masculins par leur courage et par leur efficacité au combat. Les femmes soldats se sont distinguées à maintes reprises au cours de l’histoire du Royaume du Dahomey, notamment lors des batailles de Savi (1727), d’Abéokouta (1851 et 1864), de Ketou (1886), ainsi qu’au cours des deux guerres qui l‘opposèrent aux Français, jusqu’à la chute d’Abomey en 1892. Elles étaient particulièrement redoutées au corps à corps et participaient à la stratégie d’intimidation menée par le Dahomey envers ses adversaires.

La reine Tassin-Hangbé

C’est au 17ème siècle qu’apparaissent des gardes du corps femmes. Mais c’est la reine Tassin-Hangbé Ahangbé l’unique reine guerrière du royaume. qui créa cette armée de femmes soldats » ainsi surnommées par les colons en écho aux Amazones de l’Antiquité. Cette souveraine a occupé de 1708 à 1711 le trône du Dahomey. La tradition orale fait remonter la création des agoodjie au règne d’Akaba dont la sœur jumelle hangbé régnait avec lui, respectant la tradition fon qui veut que les jumeaux soient respectés l’un et l’autre de la même manière quel qu’en soit le sexe. Il en va ainsi des rois comme du commun. Après la mort d’Akaba (variole) en 1708 dirigeant sont armée contre les Ouéménou, sa jumelle aurait prit la direction des troupes et les conduisit à la victoire.

Minos ou Agon djié

Le peuple les surnommait les Minos (nos mères) en langue fon. Ces soldates combattaient aux côtés des hommes et ont représenté jusqu’à un tiers des effectifs. Généralement, elles protégeaient le roi sur le champ de bataille. Certaines gardaient uniquement le palais royal et assuraient la défense du roi. Ces redoutables guerrières s’entraînaient quotidiennement pour renforcer leur musculature, Elles combattaient des taureaux à mains nues, elles s’exerçaient à la machette, à la massue ou aux armes achetées aux Européens.

Les meilleures étaient formées pour devenir des espionnes et d’autres étaient les représentantes officielles du roi à l’extérieur du royaume. Leur uniforme cachait leurs formes et elles portaient une sorte de calotte blanche sur leurs cheveux coupés très courts. Elles s’entrainaient à la douleur en rampant sur des épines, en sautant des haies épineuses de plusieurs mètres. Elles couraient, luttaient, s’entrainaient efficacement au tir où elles excellaient. Leur condition physique était remarquable.

Allure et équipement

Les vêtements étaient variables selon l’utilisation. A la parade, tuniques à rayures verticales bleues et blanches. Les tenues d’apparat étaient différentes et colorées et variaient selon les unités qui se présentaient. Quand elles combattaient, les agoodjie portaient des tuniques grises tachées de sang séché, des écharpes blanches parfois. D’autres on décrit des pagnes de raphia. , attachaient à leurs ceintures de nombreux gris-gris sensés les prémunir de la mort et des blessures, des amulettes offertes par le roi, des clochettes en fer. Certaines avaient des colliers et des bracelets de perles de verres et de corail, des anneaux de fer et de laiton. Les grandes officières portaient des cornes en argent ou en or. De nombreuses sortent de chapeaux pouvaient orner leurs têtes.

Les archères portaient au bras gauche une protection en ivoire. Elles se mettaient en marche vers la bataille, munies de mousquets à silex, de tromblons et de machettes. Leur arme la plus redoutable était une sorte de rasoir à l’européenne, long de 70 cm qui s’ouvrait grâce à un puissant ressort et qui, de sa lame tranchante pouvait couper un homme en deux… Elles maniaient leurs lourdes massues et leurs lances avec habileté. Dans leur équipement de campagne se trouvait une cordelette pour entraver les prisonniers et un linceul pour qu’elle soit enterrées dignement tout de suite après la bataille dans la terre du Dahomey.

Seh-dong-hong-beh

« Son nom se traduit par “Dieu dit la vérité”. Elle est la chef des célèbres guerrières [du Dahomey, ancien nom du Bénin], bien ancrées dans l’Histoire mais dont on oublie souvent la provenance. Aux alentours de 1850, Seh-Dong-Hong-Beh dirige cette armée composée de plus de 5 000 combattantes. Leur combat le plus connu est l’assaut lancé contre la forteresse Egba d’Abeokuta [au Nigeria]. A la fin du XIXe siècle, le roi du Dahomey Behanzin mène la guerre contre les colons français. Dans son armée de 10 000 guerriers, on trouve encore 1 200 femmes soldats, qui se battent jusqu’à la mort. On raconte qu’elles ont préféré brûler leurs villages plutôt que de les abandonner aux colons » écrit Grâce Loubassou

Le mythe des amazones

L’existence des amazones demeure floue. L’étymologie du mot apparut dans l’Illiade d’Homère ainsi que leur origine sont incertaines. La littérature qui entoure le mythe révèle des mœurs à l’opposé des agoodjie. Alain Bertrand rappelle que selon Strabon, ce mythe ne distingue pas ce qui vient de la fable de ce qui vient de la réalité. L’histoire des agoodjie reste encore du domaine du factuel.

Vaincre ou mourrir

« Vaincre ou mourir » était leur adage, il n’y avait pas de place pour la demie mesure. Leur courage, leur aptitudes au combat ainsi que le récit de leurs victoires imposaient le respect. «  A leur passage, la population s’agenouillait en signe de reconnaissance et de gratitude […]. Les Minos étaient considérées comme des demi-déesses ». En 1984, après de nombreuses défaites contre l’empire impérialiste et coloniale français, le bataillon des Agoodjie sera dissout. La quasi-totalité d’entre elles étaient tombées sous les balles. Nawi, la dernière amazone s’est éteinte en 1979 à l’âge de 100 ans. Les femmes béninoises honorent chaque année la mémoire de ses combattantes hors du commun. Ainsi pour préserver leur histoire évitons de les nommer amazones ou de les associer aux fables de Marvel.

Sources

Laurence Dionigi 50-50 magazine, Chateau vaudou, Gauchemip.org Histoire par les femmes, Adiac Congo, Retronews, Le Petit Journal, 23 septembre 1876 , Unesco.org, Seh-Dong-Hong-Beh, chef des Amazones du Dahomey. Dessin de Frederick Forbes, 1851.

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